mise à jour le 3 Mai 2006

 

CONFÉRENCE
"D'AUTRES MONDES DANS L'UNIVERS"

Par Michel MAYOR

Astronome à l'Observatoire de Genève,
Professeur ordinaire à l'Université de Genève
Organisée par l'IAP

98 bis Av Arago, Paris 14 ème

 

le mardi 2 Mai 2006 à 19H30

 

 

 

Photos : JPM.pour l'ambiance Les photos en haute définition sont disponibles sur simple demande pour ceux qui le souhaitent

 

 

 

BREF COMPTE RENDU

 

 

 

 

 

Bien entendu, comme dans les grandes occasions, la salle de l'IAP est pleine pour entendre le Pape des exo planètes, Michel Mayor, en effet dans toutes les découvertes il y a un premier et bien pour les planètes extra solaires, ce fut M Mayor (sans oublier son compère Didier Queloz bien sûr).

 

 

HISTORIQUE.

 

 

 

Michel Mayor a commencé sa carrière avec les galaxies et l'évolution des ondes spirales; puis se dirige vers les étoiles doubles et enfin les planètes hors du système solaire.

 

En introduction il nous dit avec son léger mais sympathique accent suisse, que la question d'autres mondes a toujours été présente chez les philosophes depuis les temps les plus anciens, et nous propose un bref rappel de la vision de l'antiquité.

 

Puis vint l'ère de Galilée qui voit pour la première fois une multitude d'étoiles dans sa lunette.

 

 

Le XXème siècle fait faire des progrès dans la compréhension de notre galaxie, la Voie Lactée et c'est l'ère de télescopes spatiaux avec cette extraordinaire image prise par Hubble , le Hubble Deep Field qui nous montre des milliers de galaxies à perte de vue dans un coin du ciel, choisi pour être les plus "noir" possible.

 

 

 

 

La pensée sur le nombre de galaxies pouvant exister a évolué seulement au cours du XXème siècle; on pensa au début bien entendu (version anthropique oblige!) qu'il n'y avait qu'une seule et unique galaxie, la notre, comme le célèbre James Jeans; puis vers 1940 on pensa qu'il y avait peut être quelques systèmes planétaires dans notre galaxie, puis on se rendit compte de l'universalité des galaxies.

 

 

L'astronomie moderne nous fit ensuite découvrir grâce aux télescopes spatiaux des nuages proto planétaires (en anglais : proplyds : proto planetary disks) autour d'étoiles de notre galaxie, notamment cette superbe vue de Hubble prise dans la "nébuleuse" d'Orion.

 

 

Ces proplyds se forment autour des étoiles "jeunes" d'Orion, jeunes veut dire quelques millions d'années ou dizaines de millions d'années , une comparaison employée par M Mayor : équivalent à un bébé de quelques jours pour l'être humain.

 

C'est donc en 1995 que l'on voyait pour la première fois ces disques d'accrétion lieu de formation des planètes, passage d'un disque de gaz et de poussières à des vraies planètes.

 

Donc ce fut un argument très fort concernant l'existence de systèmes planétaires en dehors de notre système solaire.

 

 

 

 

Les planètes étaient vues comme un sous produit obligé de la formation des étoiles, une révolution!

 

 

Il fallait maintenant en démontrer l'existence.

 

 

 

COMMENT LES METTRE EN ÉVIDENCE?

 

 

Il ne suffit pas d'augmenter indéfiniment la taille des télescopes pour voir ces planètes extra solaires (appelées aussi exoplanètes); en effet les étoiles brillent de trop et les planètes ne font que réfléchir la lumière et sont très peu lumineuses, donc méthode directe pour le moment presque impossible.

 

Comme comparaison le conférencier nous indique qu'une planète comme la Terre serait équivalente à la luminosité d'une bougie posée à côté d'une puissant phare de marine et le tout situé à 1000km de distance!!!

 

Donc on ne peut découvrir des planètes extra solaires que par des méthodes indirectes.

 

Et la méthode la plus ancienne est la méthode du mouvement propre de l'étoile dû à la présence de planètes; en fait quand on dit qu'une planète tourne autour de son étoile, c'est faux, la planète et l'étoile tournent autour de LEUR CENTRE DE MASSE COMMUN, il s'en suit un mouvement (plus ou moins important suivant les rapports de masse) de l'étoile devant le fond du ciel; c'est ce plus ou moins petit mouvement qu'on essaie de détecter.

 

Cette variation est généralement très faible, dans le cas de Jupiter et de notre Soleil, la variation de vitesse radiale du soleil serait de ….13m/sec et la Terre de….8cm/sec!

 

Cette méthode s'appelle la méthode des vitesses radiales (radial velocity en anglais).

 

 

 

C'est grâce à cette méthode que la première planète extra solaire a été trouvée par M Mayor et D Queloz avec le spectrographe ELODIE de l'Observatoire de Haute Provence (OHP). C'est la planète baptisée 51 Peg b, tournant autour de l'étoile 51 Peg dans le carré de Pégase et située à 42 années lumière de nous, donc très très proche.

Ils ont mesuré les variations de vitesse nuit après nuit et ont eu la surprise de noter que la période était très rapide : 4,2 jours!!!

 

Ils ont mesuré aussi la distance à l'étoile : surprise aussi elle est très près : 0,04UA et de masse 0,5 celle de Jupiter et température évaluée à 1300°K.

 

C'est le premier élément de ce que l'on va appeler des "Jupiter chauds" (Hot Jupiter).

 

 

Cette découverte pose accessoirement la question sur la masse maximum que peut avoir un planète. Les planètes en formation dans le disque proto planétaire agglutinent toute la matière dans leur sillage (elles créent ou ouvrent  un "corridor") donc il doit y avoir une limite en masse. La limite a été arbitrairement fixée par l'UAO à 13 masse de Jupiter, en gros la taille à partir de laquelle on a des naines brunes (brown dwarfs en anglais).

 

 

 

On découvre de plus en plus des planètes voisines de masses terrestres, comme par exemple 2M 1207 au VLT, qui est une planète extra solaire de approx. 5 masses terrestres tournant autour d'une naine brune.

 

 

Mais on découvre aussi des planètes plus lourdes que la limite officielle de 13 MT comme par exemple HD 168443 qui est un système avec double planète en résonance, comme on le voit sur le relevé des vitesses radiales (composition de deux sinusoïdes).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

UN NOUVEL OUTIL : HARPS

 

La technique des vitesses radiales arrive à ses limites, en effet la circonférence des étoiles n'est pas parfaitement définie : éruptions comme sur notre Soleil, vibrations  etc.. induisent des bruits ou une imprécision dans la mesure.

C'est pour cette raison que HARPS a été développé.

 

HARPS = High Accuracy Radial velocity Planet Searcher est un nouvel outil spectrographique adapté à la recherché de planètes extra solaires par la méthode des vitesses radiales.

 

Il est monté sur le télescope de 3,6m à La Silla au Chili.

Sa précision nominale est de 1m/sec pour la mesure des vitesses radiales.

 

 

 

 

D'AUTRES MÉTHODES POUR DÉTECTER LES EXOPLANÈTES.

 

 

Nos lecteurs savent bien qu'il existe d'autres méthodes pour détecter ces planètes extra solaire, dont la méthode du transit, qui est une mesure directe de la taille de la planète lorsqu'elle passe devant son étoile et qu'elle y produit une très légère extinction de luminosité.

 

C'est une méthode qui marche très bien et qui est adaptée même à des télescopes de petites dimensions.

 

 

La première exoplanète ainsi détectée était la célèbre HD 209458b, qui a été immédiatement baptisée Osiris et dont nous avions parlée avec Roger Ferlet à la SAF.

 

Cette planète est aussi une Jupiter chaude : 1,4 Rayon Jupiter, 0,7 Masse Jupiter donc densité 0,3.

 

 

Quelques temps après cette découverte, Hubble tournait son télescope de 2,4m vers ce système planétaire.

 

Pendant les transits il a analysé l'atmosphère de la planète extra solaire au moment où elle passe le limbe; et a pu donc atteindre sa composition et diverses autres informations.

 

On détecte alors H C et O mais on s'aperçoit en étudiant la longueur d'onde de l'Hydrogène (Lyman alpha) que l'atmosphère de cette planète …s'évapore.

Le phénomène est expliqué à la fin de la présentation de R Ferlet, vous y reporter pour plus de détails.

 

Le public très attentif aux explications de Michel Mayor

 

 

 

 

 

VA T ON TROUVER DES PLANÈTES "TERRESTRES"?

 

OGLE est le nom d'un projet international de recherche de telles planètes : Optical Gravitational Lensing Experiment qui étudie des centaines de millions d'étoiles du centre de notre galaxie.

 

Le projet PLANET (Probing Lensing Anomalies NETwork) est aussi partie prenante dans cette recherche et c'est une équipe internationale coordonnée par Jean Philippe Beaulieu de l'IAP, qui  vient de découvrir une planète extra solaire qui pourrait être de type terrestre. Son nom n'est pas très poétique : Ogle-2005-BLG-390Lb, elle porte classiquement le nom de son étoile auquel on a rajouté un b. cette étoile est située dans notre galaxie à une distance de l'ordre de 22.000années lumière.

 

C'est à ce jour la plus petite planète extra solaire découverte.

 

Mais c'est aussi une découverte importante car c'est une planète qui tourne autour d'une étoile courante dans l'Univers (plus de 80% des étoiles sont des naines rouges), une naine rouge, c'est donc un (bon?) signe que les planètes sont certainement plus fréquentes que l'on ne le pense.

Mais comment peut on donc détecter des planètes aussi loin?

 

On ne les voit pas directement bien sur, on ne peut même pas voir l'étoile, on la détecte par la dernière méthode de détection des exoplanètes, la méthode des micro lentilles gravitationnelles comme nous l'a expliqué Y Mellier lors de sa dernière conférence à la SAF.

 

 

Mais le futur appartient aux projets spatiaux comme Corot, mission européenne prévue pour 2006 et Kepler de la NASA pour 2008.

 

Corot, dont nous a parlé Annie Baglin doit étudier 60.000 étoiles, son collègue US lui doit étudier 100.000 étoiles, toutes des étoiles ayant la possibilité d'abriter des planètes de type terrestres.

 

Mais tous ces projets nécessitent des satellites opérationnelles pendant de longues périodes, pourquoi? Élémentaire mon cher Watson, une planète qui abriterait la vie devrait être loin de son étoile (comme la Terre) pour des raisons thermiques et donc avoir une période de l'ordre de l'année et donc pouvoir être étudiée pendant plusieurs périodes, donc une durée de vie opérationnelle de plusieurs années est nécessaire.

 

 

 

Mais alors, de telles planètes peuvent elles abriter la vie?

 

 

À propos qu'est ce donc que la vie??

 

On ne sait pas bien le définir, alors autre question :

 

Quelles qualités doit avoir une planète pour abriter la vie? Qu'est ce qui caractérise notre planète?

 

Voici présenté par M Mayor une comparaison de spectres IR des atmosphères des planètes Vénus, Terre et Mars; que remarque t on? Il y a pour notre planète une raie caractéristique, celle de l'Ozone (O3) à 9,7 µ résultat de la vie et qui donc semble être un traceur de la vie.

 

C'est peut être cette raie là qu'il faut chercher dans l'espace.

 

 

Comment peut on faire pour effectuer de telles mesures?

 

Par interférométrie, la lumière étant une onde, il "suffit" (euphémisme!) d'avoir deux détecteurs décalés d'une demie période pour que les signaux de l'étoile quand on les additionne algébriquement, se…retranchent, augmentant ainsi la capacité de voir mieux la luminosité des éventuelles planètes autour de cette étoile.

Ce n'est bien sûr que le principe simplifié.

 

Il faut donc être capable d'analyser les atmosphères des planètes extra solaires, c'est le but de ces nouvelles missions spatiales dont nous reparlerons certainement dans quelques temps.

 

 

 

 

 

Nombreuses questions même du jeune public!!

 

 

(désolé je suis obligé de par la loi de flouter les visages des mineurs que l'on voit de trop près)

 

 

 

Merci Michel Mayor de nous avoir fait rêver.

 

 

 

POUR ALLER PLUS LOIN.

 

 

Le programme de recherche des planètes extra solaires de l'Observatoire de Genève (en anglais).

 

Planet Quest le site de la NASA pour la recherche des autres Terres (anglais), très clair comme d'habitude.

 

Des planètes géantes et les disques proto planétaires par Marcy et Butler de Berkeley (anglais).

 

La formation de planètes à partir de disques proto planétaires (anglais).

 

Les systèmes planétaires et leur formation par P Artymowicz. (anglais)

 

Trois nouvelles planètes extra solaires ont une masse comparable à celle de Neptune (anglais).

 

Un article pdf de 5 pages en anglais sur les performances du système HARPS.

 

Une présentation Power Point sur Harps en français par l'Observatoire de Gnève.

 

 

SUR LE SITE DE PLANETASTRONOMY.COM /

 

Découvertes et recherche d'Exoplanètes :

o           Keck : .une planète tourne autour de AUMic (33al) (19/08/2004)

o           Exoplanètes : une nouvelle sorte de planète découverte. (08/09/2004)

o           La plus petite exo-planète découverte (10/09/2004)

o           Première photo d'une planète extra solaire? (17/09/2004)

o           Une première mondiale : Spitzer vient de voir des exoplanètes! (25/03/2005)

o           Exoplanètes : Emmanuel Jehin avait raison, c'était l'ESO, bravo!!!!!!! (13/05/2005)

o           Retour sur la première photo d'exoplanète : Gaël Chauvin nous répond. (09/06/2005)

o           Terre à l'horizon? : Une exoplanète cousine de la notre. (26/06/2005)

o           Les planètes extra solaires : CR de la conférence de R Ferlet à la SAF. (28/12/2005)

o           La mission Corot : CR de la conférence d'Annie Baglin à la SAF (29/01/2006)

o           Exoplanète, une découverte majeure : une grosse Terre très loin….(29/01/2006)

 

 

 

 

 

 

 

C'est tout pour aujourd'hui!

 

Bon ciel à tous

 

Jean Pierre Martin

http://www.planetastronomy.com/