Mise à jour 19 Décembre 2015  - ajout vidéo

CONFÉRENCE MENSUELLE DE LA SAF
 «LE RÔLE DE L’EAU DANS LE SYSTÈME SOLAIRE»

Par Thérèse ENCRENAZ
Astrophysicienne LESIA , Dir de recherches CNRS,

Spécialiste des atmosphères planétaires

À l’AgroParisTech 16 rue C Bernard Paris 5.

Le Mercredi 9 Décembre 2015 à 19H00  Amphi Tisserand

 

Photos : JPM pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)

Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.  Voir les crédits des autres photos et des animations.

Le conférencier a eu la gentillesse de nous donner sa présentation, elle est disponible sur ma liaison ftp et s'appelle :

h2o-saf-dec15.pdf, elle est dans le dossier CONF-MENSUELLES-SAF/ saison 2014-2015. .

Ceux qui n'ont pas les mots de passe doivent me contacter avant.

 

Cette conférence a été filmée en vidéo (grâce à UNICNAM et IDF TV) et est accessible sur Internet

On la trouve à cette adresse  

https://youtu.be/vDep_yGZraU?list=PL1ZHG2CIuv2eJ3i4ijAVqcAofnIc4gPl4

 

 

Malgré les derniers évènements tragiques qui nous avaient obligé d’annuler la conférence de Novembre,
notre public nous est resté fidèle !

 

 

LE RÔLE DE L’EAU :

 

L’eau est une molécule omniprésente dans l’Univers, elle a un rôle essentiel dans la formation des planètes du système solaire et dans l’évolution des planètes telluriques.

L’eau est une molécule toute simple.

L’eau liquide (H2O) est un traceur possible de la présence de vie sur les exoplanètes

L’eau ; une molécule toute simple qui possède les propriétés suivantes :

·         Présente sur la Terre sous ses trois formes: solide, liquide, vapeur, avec cette caractéristique fondamentale : la glace est moins dense que l’eau. Imaginez un monde où ce ne le serait pas

·         Liquide sur un large intervalle de températures

·         Excellent solvant, favorise les réactions chimiques

·         Amortisseur thermique

·         Rôle essentiel dans le développement de la vie

 

 

 

 

Diagramme de phases de l’eau.

 

Où trouver de l’eau à l’état liquide dans le Système Solaire ?

 

·         À faible pression dans les atmosphères des planètes telluriques

·         À forte pression, à l’intérieur de satellites de planètes gazeuses.

 

On ne peut pas observer la vapeur d’eau depuis la Terre, notre atmosphère absorbant une très grande partie, il faut aller dans l’espace.

 

 

 

 

 

On remarque qu’entre 1 et 10 microns, on peut observer des vibrations de la molécule d’eau.

 

Les noyaux des atomes oscillent et donnent des vibrations dont la fréquence dépend de la taille de l’atome. Comme on le voit sur ce graphique.

 

Dans notre cas, l’eau entre dans des modes de vibrations les plus fréquents à :

2,73 ; 6,22 et 2,66 microns.

Ce sont les signatures de l’eau !

 

 

 

Il y a trois modes principaux de vibrations représentés par ces différentes figures animées en gif :

 

Figure 1       figure 2      figure 3

 

 

En 1995, l’Agence Spatiale Européenne a lancé le satellite "ISO" (Infrared Space Observatory) pour procéder à la détection d’eau depuis l’espace. Il fait une multitude de découvertes : l’eau est partout !

Ce satellite a fourni des données aux scientifiques jusqu'en 1998 et a fait avancer rapidement les recherches d'eau dans l'Univers.

Plus récemment Spitzer et Herschel prennent le relais.

 

 

 

LE RÔLE DE L’EAU DANS LA FORMATION DES PLANÈTES.

 

 

Les planètes se sont formées au sein d’un disque proto-planétaire, par effondrement gravitationnel d’une nébuleuse en rotation. (Phénomène courant dans l’Univers que l’on observe tous les jours et déjà pressenti au XVIIIème siècle).

Lors de l’effondrement il y a agrégation des particules solides, les corps ainsi créés croissent de plus en plus.

 

--------------------------------------------à

Température décroissante.

 

Étapes de la formation stellaire :

En a) : phase pré stellaire, nuage moléculaire

En b) et c) : phase proto stellaire, effondrement gravitationnel

En d) : phase T-Tauri (pré-séquence principale), formation  disque d’accrétion

En e) : l’étoile a atteinte l’état de la séquence principale, les réactions nucléaires s’allument et le système planétaire se forme.

 

Illustration d’après: Astrophysical and astrochemical insights into the

origin of life

 

Dans ce disque, la température décroît avec la distance au Soleil.

        Près du Soleil (>300 K) les éléments les plus abondants sont H, He, C, N, O, seuls les silicates et les métaux moins abondants sont sous forme solide -> faible masse solide disponible -> cela va donner naissance à des planètes telluriques plutôt petites

        Loin du Soleil, les éléments H2O, CH4, NH3… sont sous forme de glaces donc disponibles en grande quantité pour former de gros noyaux -> effondrement du gaz protosolaire environnant (H, He) dès que    Mn >10-15 MT -> naissance de planètes géantes

        L’eau est la molécule la plus abondante et la première à condenser -> marque la ligne des glaces (frost line ou snow line)

 

Les petits corps qui n’ont pas été accrétés, vont eux donner naissance aux astéroïdes (près du Soleil, riches en roches) et aux comètes (loin du Soleil, riches en glace).

 

 

 

 

 

Quand la température baisse, la première glace à condenser dans le disque protosolaire est l’eau.

Comme on le voit sur ce diagramme de pression de vapeur saturante/température pour les gaz condensables des planètes extérieures.

À pression constante, H2O se condense à une température beaucoup plus haute que les autres gaz, donc c’est elle qui commencera à condenser plus on s’éloignera du centre du Système Solaire.

 

Deux classes de planètes géantes existent donc dans notre système solaire.

En effet Jupiter et Saturne se sont créés proche de la ligne des glaces avec beaucoup de matière à disposition, elles sont devenues des géantes gazeuses.

Mais au début de la création du Système Solaire notre Soleil était dans sa phase T-Tauri et un puissant vent solaire balayait l’ensemble, si bien que l’Hydrogène disponible était chassé hors du Système Solaire. Uranus et Neptune formées aussi sur des noyaux de glaces, n’ont accrété que peu de gaz. Ce sont des géantes glacées.

 

 

 

 

 

 

L’EAU DANS LE SYSTÈME SOLAIRE EXTÉRIEUR.

 

Après leur formation initiale, les planètes géantes, l’effondrement gravitationnel favorise la formation d’un disque équatorial comprenant des petits et des gros satellites (comme un système solaire en miniature).

Mais les gros satellites ne peuvent rester trop près de la planète sinon ils seraient détruits par effet de marée, ce qui favorise de nouveau un anneau équatorial constitué majoritairement de petites particules.

 

Les planètes comme Jupiter et Saturne possèdent de l’eau à l’intérieur (eau apportée par les comètes, voir SL-9) et à l’extérieur !

 

Les satellites extérieurs, comme Europe, Ganymède et Callisto sont couverts de glace, Europe est particulièrement intéressante, car il y a certainement sous sa couche de glace un océan d’eau en contact avec l’assise rocheuse.

Concernant Europe et Ganymède, on devrait en savoir plus avec la mission JUICE de l’ESA

 

http://www.planetastronomy.com/astronews/astrn-2009/15/astron25.jpg

Quant à Saturne, les anneaux sont constitués de multitude de grains de glace, mais la surprise ce fut, Titan, le plus gros satellite de Saturne ; Huygens se pose sur des galets de glace d’eau, dans le lit d’une ancienne rivière de…méthane.

 

Autre surprise du monde de Saturne, le petit satellite Encelade, ses geysers d’eau alimentent l’anneau E.

 

Il y aurait aussi de l’eau liquide sous la surface.

 

Photo : Encelade en cours d’évaporation. (NASA)

 

 

 

 

 

 

 

 

LES COMÈTES.

 

Les comètes sont formées à 80% d’eau (glace) ce sont les témoins de la formation du système solaire et peut être une des sources de l’eau de nos océans.

 

Deux réservoirs principaux : ceinture de Kuiper au-delà de Neptune et nuage d’Oort aux confins de notre système solaire.

La comparaison des compositions de l’eau des comètes et de l’eau océanique est fondamentale pour la détermination de l’origine.

 

On détecte de l’eau dans la queue de la comète de Haley lors de son passage en 1986 (mission Giotto et Vega notamment). Puis plus tard lors du passage de Hale-Bopp en 1997, la signature de l’eau est détectée par ISO.

 

La comète Churyumov-Gerasimenko étudiée par Rosetta en ce moment est aussi constituée en très grande partie de glace.

On a pu étudier son rapport D/H marqueur des zones froides du système solaire (10 à 30K).

Voir ce rapport.

 

 

LE RÔLE DE L’EAU DANS L’ÉVOLUTION DES PLANÈTES TELLURIQUES.

 

 

Ces trois planètes avaient à peu près les mêmes chances au départ (mêmes atmosphère primitive), mais elles ont eu des destins différents. Pourquoi ?

 

Vénus : pression 95 bars de CO2 température au sol approx : 450°C

 

Effet de serre énorme, l’eau présente à l’origine s’est échappée. (confirmé par l’étude du D/H)

 

 

La Terre : pression 1 bar (azote et oxygène) température : 15°C.

Conditions optimales pour abriter la vie. Un effet de serre modéré a fait que sa température de surface est de 15°C au lieu de -15°C sans effet de serre

L’atmosphère permet l’eau liquide, le CO2 est capté par l’océan pour donner CaCO3

L’Oxygène forme la couche d’ozone (O3) protectrice.

 

Mars : pression 6 mbar de CO2  température : -40°C

Le D/H de l’atmosphère est 5 fois plus important que sur Terre. L’eau très présente aussi, s’est très vite échappée dans l’espace dû à la faible gravité et à l’absence de champ magnétique, laissant ainsi agir le vent solaire.

Il reste de l’eau (glace) sous la surface, surtout près des pôles. Même si on trouve épisodiquement de la saumure sur Mars, l’eau a bien disparu.

 

 

 

 

L’EAU DANS LES EXOPLANÈTES.

 

Depuis 1995, quelques milliers de planètes extra solaires ont été découvertes dans notre proche environnement.

 

Le problème avec les exoplanètes c’est leur détection difficile, en effet la séparation angulaire avec leur étoile est très faible, alors que la différence de luminosité est énorme.

 

Autant dire, qu’il n’est pas facile de détecter directement une planète extra solaire, il faut faire appel à des méthodes indirectes comme :

·         Mesurer le déplacement de l’étoile dû à la légère rotation provoquée par la présence de la planète (effet Doppler, méthode des vitesses radiales). C’est par cette méthode que M Mayor et D Queloz ont découvert la première exoplanète en 1995 ou

·         Mesurer les variations de luminosité lors du passage de la planète devant son étoile (méthode du transit). C’est la méthode adoptée par les télescopes spatiaux comme Corot et surtout Kepler qui a découvert des milliers d’exoplanètes en quelques années de mission.

 

Notre système solaire semble bien différent de tout ce qui a été détecté à ce jour. Sommes-nous atypiques ? Et si oui, pourquoi ?

 

Dans les systèmes stellaires différents du nôtre, les planètes géantes semblent se former dans la zone externe et ensuite migrer vers le centre. Dans le nôtre une migration probablement plus faible s’est peut être aussi produite avec Jupiter et Saturne mais cela a l’air bien différent de ce que l’on a découvert dans ces systèmes stellaires externes au nôtre.

 

 

La spectroscopie effectuée lors des transits met en évidence la composition atmosphérique, et on détecte dans certains des molécules comme : H2O, CO, CO2, CH4….

 

Pour rechercher la vie (et l’eau) sur des planètes extra solaires, il faut rechercher les marqueurs de la vie qui sont :

H2O, O2, O3, CH4, les « bio-marqueurs ».

 

Ils se trouvent obligatoirement dans la zone habitable de l’étoile.

Cette zone habitable est variable suivant la puissance de l’étoile, pour nous, la Terre est située en plein dedans, mais pour une étoile moins brillante (naine brune par exemple) elle serait plus proche de l’étoile. Voir graphique et des présentations sur les exoplanètes.

 

 

 

 

 

 

CONCLUSION.

 

 

 

·         L’eau est présente partout dans l’Univers

·         Leau est responsable de la formation des planètes en deux classes (telluriques et géantes)

·         Leau est responsable (en grande partie) des destins divergents des planètes telluriques de notre Système Solaire

·         Leau liquide na été trouvée à ce jour que sur Terre (mais a existé sur Mars, et peut être sous la surface d’Europe et d’autres satellites comme Encelade, Ganymède..)

·         Pour rechercher la vie sur les exoplanètes, on s’intéresse à celles où l’eau pourrait être liquide

 

 

 

 

 

 

POUR ALLER PLUS LOIN :

 

Quelques ouvrages de Thérèse Encrenaz :

 

À la recherche de l'eau dans l'Univers par Th. Encrenaz 

 

Les planètes extra solaires par Th Encrenaz chez Belin

 

Les planètes, les nôtres et les autres par Th Encrenaz chez EDP

 

L'exploration des planètes par Th. Encrenaz et J. Lequeux chez Belin

 

À la rencontre des comètes par Th Encrenaz et J Lequeux chez Belin

 

 

 

Les atmosphères planétaires par Th Encrenaz LESIA le 10 Mars 2005 SAF/commission cosmologie

 

Les atmosphères planétaires par Astronomia.

 

Calcul des fréquences de vibration de la molécule d’eau.

 

Le rôle de l’eau dans la formation du Système Solaire par la société française d’exobiologie. À consulter.

 

L’eau dans l’univers, mémoire par Jacques Sauquet, Observatoire de Paris. Très complet.

 

 

 

 

Prochaine conférence mensuelle de la SAF : Mercredi 13 Janvier 2016   19H00   AgroParistech   Amphi Tisserand

Nous avons le plaisir de recevoir :

David Valls-Gabaud  Dr de recherches CNRS   LERMA Observatoire de Paris   Astrophysicien.

 

Mirages et lentilles gravitationnelles, la gravitation en action.

D’après Wikipedia :

En astrophysique, une lentille gravitationnelle, ou préférablement un mirage gravitationnel, est produit par la présence d'un corps céleste très massif (tel, par exemple, un amas de galaxies) se situant entre un observateur et une source « lumineuse » lointaine. La lentille gravitationnelle, imprimant un fort champ gravitationnel autour d'elle, aura comme effet de faire dévier les rayons lumineux qui passeront près d'elle, déformant ainsi les images que recevra un observateur placé sur la ligne de visée.

En cas d’alignement parfait de la source observée et du corps céleste jouant le rôle de lentille gravitationnelle par rapport à l'observateur, le mirage peut prendre la forme d'un anneau d'Einstein.

Prédits par la relativité générale d'Albert Einstein, plusieurs mirages gravitationnels ont depuis été observés par, entre autres, le télescope spatial Hubble. Ils sont particulièrement présents lorsque l'on fait des clichés de champs profonds de l'univers observable. Ils font l'objet de plusieurs études et leurs effets servent, notamment, à la détection de la matière noire présente dans l'Univers.

 

 

 

Entrée libre mais réservation obligatoire. À partir du 10 Décembre 2015..

 

 

 

Bon ciel à tous

 

 

Jean Pierre Martin   Président de la commission de cosmologie de la SAF

www.planetastronomy.com

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