Mise à jour le 11 Octobre 2019
CONFÉRENCE
« LA SYNTHÈSE DES ÉLÉMENTS LÉGERS DANS L'UNIVERS PRIMORDIAL »
Par Cyril PITROU astrophysicien IAP
Organisée par l'IAP
98 bis Bd Arago, Paris 14ème
Le Mardi 1er Octobre 2019 à
19H30
Photos : JPM pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent
m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.
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BREF COMPTE RENDU
Cyril
Pitrou possède un DEA en physique théorique de l’IAP.
Post docs à l’Université d’Oslo et de Portsmouth.
À partir de 2012 chargé de recherche CNRS à l’IAP.
Voici l’intro de sa conférence :
« L'essentiel de l'hélium présent dans l'Univers est le résultat de réactions
nucléaires présentes au cours des 5 premières minutes, et celui-ci constitue le
quart de la matière ordinaire de l'Univers. Ces réactions ont été efficaces car
dans sa grande jeunesse notre Univers était riche en neutrons. D'autres éléments
légers ont également été formés, notamment le deutérium, mais dans des
abondances bien inférieures. Observer les abondances des éléments légers nous
permet de comprendre cette phase primordiale autrement inaccessible aux
observations directes, et ainsi de contraindre très fortement le modèle
cosmologique standard. »
Je m’inspire aussi de comte rendus précédents sur des sujets identiques.
Tout le monde connaît la table de Mendeleïev dont l'élaboration a commencé en
1869, et qui classe les différents éléments présents sur Terre en fonction de
leurs caractéristiques atomiques (nombre de protons/électrons).
On va s'intéresser aux éléments dits "légers" c'est à dire : H : Hydrogène; He :
Hélium; Li : Lithium; Be : Béryllium; B : Bore.
On y ajoute classiquement un isotope de l'Hydrogène (1 proton 1 neutron) appelé
Deutérium (D) qui va jouer un rôle particulier dans l'élaboration de ces
éléments.
Signalons une terminologie surprenante, pour les astronomes, tous les corps
autres que H et He seront appelés des….."métaux
L'abondance dans l'Univers en nombre d'atomes de ces premiers éléments est
connue :
Éléments |
H |
D |
He |
Li |
Be |
B |
Abondance en % atomes |
90% |
0,001% |
10% |
10-7 % |
10-9 % |
10-8 % |
Ces valeurs sont des ordres de grandeur.
On trouve dans la littérature pour H et He les chiffres de 75% et 25%,
attention, ce n'est pas contradictoire, dans ce cas ce sont des pour cent en
masse ! (L’Hélium est 4 fois plus lourd que l'Hydrogène).
Tous les autres éléments sont présents dans l'Univers à l'état de traces (nous
sommes nous même à l'état de traces, cela devrait nous rendre humbles !).
Comment en est-on arrivé à la formation (ou nucléosynthèse) de ces éléments
légers ?
Pour information, nucléosynthèse signifie création
des noyaux atomiques.
Il y a 3 voies de formation des noyaux de tous les corps de l'Univers qui
correspondent à trois processus distincts.
· La
nucléosynthèse primordiale.
· La
nucléosynthèse stellaire.
· Le
processus de spallation dans le gaz interstellaire.
L’article originel est de Gamov et de ses collègues Alpher et Bethe (de façon à
faire humoristiquement alpha, beta, gamma, Gamov était un facétieux !) Gamov
avait un sens de l'humour très poussé. (sa vie pourrait être l'occasion d'un
film!)
Le titre : « The
origin of chemical elements” paru en 1948.
Cet article parle de la synthèse des éléments légers dans l’Univers primordial.
On voit ici un graphe de stabilité des différents isotopes ainsi que leur mode
de désintégration.
Notations :
N = nombre de neutrons
Z = nombre de protons (numéro atomique)
A = nombre total de nucléons (nombre de masse)
N + Z = A
Ceci mène au concept d’abondance des éléments dans le Système Solaire.
Abondance des éléments chimiques dans l'Univers (par rapport à celle du Silicium
(Si) qui est définie arbitrairement à 106 .
L'échelle est logarithmique. Pour un million de noyaux de silicium, il y a dix
milliards de noyaux d’hydrogène et les noyaux les plus simples, hydrogène et
hélium, représentent à eux seuls 98 % de la masse du Soleil.
À partir du carbone, de l’azote et de l’oxygène, les noyaux sont de plus en plus
rares, à l’exception notable du fer, dont le noyau est le plus robuste de la
nature. S’il y a peu de lithium, béryllium et bore (Z = 3, 4 et 5) c’est que ces
noyaux sont fragiles.
Ils ne sont pas produits par fusion thermonucléaire, mais par brisure des noyaux
de carbone, d’azote et d’oxygène interstellaires sous l’impact de collisions
avec les particules rapides du rayonnement cosmique galactique.
Crédit et explications : : CEA
On en déduit pour H et He :
75% H et
24% He.
Une remarque fondamentale : le neutron est (légèrement) plus lourd que le
proton, cela va déterminer son destin, il sera mis en minorité dans l’Univers
(heureusement sinon nous ne serions pas là, NdlR), car il nécessite plus
d’énergie pour être créé que pour le proton.
Les différentes masses (en unité d’énergie car E = mc2) en
Mev :
Neutrino (0,00001) ;
Électron (0,5) ;
Proton (938) ;
Neutron (939) ;
Higgs (125.000)
En astronomie, l'intérêt du Deutérium réside dans le fait qu'il a été élaboré
pendant la
nucléosynthèse primordiale, au
tout début du Big Bang (BB), là où se sont formés les quelques éléments légers
de l'Univers (H; D; He; Li; Be).
Ceci rend la proportion de D par rapport à H essentielle pour la compréhension
du BB.
Le D est un isotope fragile synthétisé dans les premiers instants du BB et qui
est détruit à haute température, mais comme la température a baissé rapidement
suite à l'expansion, cela a arrêté à un moment la disparition du Deutérium.
Ces restes de D sont en fait un indicateur de la vitesse de l'expansion de
l'Univers et de la densité de matière.
De même il ne peut pas être conservé au sein des étoiles, la température étant
trop chaude, les réactions nucléaires le détruisent.
C’est vraiment un marqueur du Big Bang.
Le
Deutérium est un peu magique, car c’est le seul élément qui comporte une seule
particule de chaque famille :
· un proton
· un neutron
· un électron
Le Deutérium est produit à partir d’un p et d’un n suivant la
réaction ci-contre.
Une énergie de 2,2 MeV est émise lors de cette réaction.
C’est une étape intermédiaire dans les étoiles pour
fabriquer l’Hélium (2p et 2n). C’est le cycle proton-proton.
Lors de la réaction complète donnant naissance à l’Hélium, on récupère 25 MeV
d’énergie, c’est cette énergie qui fait briller les étoiles !
Le facteur d’échelle en cosmologie.
Il mesure la façon dont la distance entre deux objets évolue dans le temps en
fonction de l’expansion de l’Univers.
Il est noté a(t) à un instant t.
|
|
Dans le cas de matière, l’énergie est assimilée à mc2
uniquement et le volume de l’Univers s’est étendu par expansion en a-3. |
Dans le cas de la partie d’Univers uniquement soumis au rayonnment
(au début), l’énergie est assimilée à l’énergie photonique : hn
soit prop à l’inverse d’une longueur d’onde donc d distance a-1
en tout l’énergie est proportionnelle à a-4. |
Évolution de l’Univers au cours du temps.
Elle est déterminée par l’action de la température (qui baisse) et de
l’expansion (qui augmente).
L’expansion dilue l’énergie/matière de l’Univers, mais pas de façon égale pour
la matière et l’énergie, comme on l’a vu plus haut.
Concernant la matière, sa densité diminue avec le volume (en a-3),
pour l’énergie (photons) leur densité diminue mais aussi leur énergie, au total
diminue plus vite (en a-4).
Donc l’énergie radiative dominante au départ, est progressivement remplacée par
l’énergie matière, ce qui donne les deux époques principales de l’Univers,
le point de bascule étant vers 50 à 100.000 ans après le Big Bang.
Il y a un rapport entre l‘énergie moyenne par photon (dans la phase initiale du
BB) et la température que l’on peut résumer ainsi :
E = 2,70 kB T
kB est la constante de Boltzmann et T la température en K.
Ce qui donne comme équivalences simplifiées :
3K : 10-10 MeV
3000K : 10-7 MeV 3 106K :
10-4 MeV 3 109K
: 0,6 MeV
Le problème des neutrons, libres ils sont instables : un neutron peut se
désintégrer en un proton et un électron suivant :
Le neutron est un peu plus lourd que le proton, son nombre va avoir tendance à
disparaitre au cours du temps, la température baissant, jusqu’à un certain
équilibre :
Quand l’univers refroidit, vers 1 seconde, le taux de fabrication de neutrons à
partir de protons chute considérablement
Il est plus facile de fabriquer des p à partir des n que réciproquement
IL Y AURA DONC BIEN MOINS DE n QUE DE p DANS L’UNIVERS
Ce rapport est connu et égal à : 7
À cet instant il y a 5 fois plus de protons que de neutrons dans l’Univers, et
c’est déterminé par le Big Bang!!!! (joue sur le rapport H/He)
Le proton qui est en surnombre maintenant peut se combiner avec un neutron pour
former un noyau de Deutérium stable (hydrogène lourd)
Par un jeu de réactions nucléaires exothermiques « simples », qui se résument à
:
4 x 1H
à
4He + Énergie
On aboutit ainsi à l’Hélium, élément fondamental qui va servir de briques pour
évoluer dans l’élaboration des autres éléments.
Néanmoins, il existe un problème avec l’élément Lithium.
Les résultats semblent montrer un désaccord manifeste entre l'abondance mesurée
et celle prédite par le modèle théorique de la nucléosynthèse primordiale suite
aux observations du fond diffus cosmologique. Pas de solution évidente pour le
moment.
Progressivement les autres éléments vont être créés et ceci jusqu’au Fer,
élément le plus stable de l’Univers, pour aller plus loin il nous faudra l’aide
des super novas…..
POUR ALLER PLUS LOIN :
L'origine des éléments légers : CR de la conférence de G Hébrard (IAP) à la
SAF.
De l’eau lourde à la matière noire : CR conf. de J Audouze pour la
commission de cosmologie SAF
La nucléosynthèse primordiale : une fenêtre sur la physique des premières
minutes de l’Univers
La nucléosynthèse - Physique-Chimie présentation ppt.
Comment fonctionne le Soleil ?
The Energy density of
Universe
Cosmologie et Big Bang, état des lieux par Denis Gialis.
Notes de cours Cosmologie et Astroparticules Master 2 PSC
Bon ciel à tous !
Jean Pierre Martin. Commission de Cosmologie de la SAF.
Les autres CR des conférences IAP.
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