Mise à jour le 16 Octobre 2012
 
 
CONFÉRENCE MENSUELLE DE LA SAF
 « DE LA FUSION NUCLÉAIRE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE »
Par Roger Maurice BONNET   IAP
ISSI (International Space Science Insitute)
Au FIAP, 30 rue Cabanis, 75014 Paris (métro Glacière).
Le Mercredi 10 Octobre 2012 à 20H30
 
Photos : JPM. pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.  Voir les crédits des autres photos et des animations.
Le conférencier a eu la gentillesse de nous donner sa présentation, elle est disponible sur ma liaison ftp et s'appellent  Bonnet_SAF_101012.pdf, elle est dans le dossier CONF-MENSUELLES-SAF/ saison 2012/2013
Ceux qui n'ont pas les mots de passe doivent me contacter avant.
 
Cette conférence a été filmée en vidéo (grâce à UNICNAM et IDF TV) et est accessible sur Internet
On la trouve à cette adresse :
http://www.youtube.com/playlist?list=PLM_NLeMfZ9ToD6qoQRfYsBIF4tW00eQjm
 
 
Le compte rendu sera succinct étant donné que la présentation est disponible au téléchargement.
 
 
Salle comble pour notre célèbre conférencier !
 
 
 
 
La biographie de RM Bonnet est très longue et il m’a fallu choisir les points les plus importants.
Roger Maurice Bonnet a réussi à passer sa thèse en 1968, époque troublée dont il nous a conté certains détails anecdotiques. Nous avons eu d’ailleurs le même professeur : Alfred Kastler prix Nobel de physique.
 
Dans les années 1970-1980 il dirige ce qui va devenir le célèbre IAS (Institut d’Astrophysique Spatiale) à Orsay (à l’époque à Verrières le Buisson).
 
En 1983 il dirige le programme scientifique de la toute jeune ESA et lance pendant près de 20 ans 17 projets spatiaux, dont les plus connus comme :Giotto, Cassini Huygens, Hubble, Ulysses, SOHO, Herschel etc.. on se rappelle d’ailleurs son émotion lors du lancement de Herschel/Planck en Mai 2009, il avait supporté ce projet depuis l’origine ; quel accomplissement !
 
 
 
 
Il retourne ensuite au CNRS et devient Président du COSPAR (Committee on Space Research) puis devient Directeur de l’ISSI basé à Berne.
 
Bien entendu, il est membre d’un grand nombre d’académies. Signalons qu’il a obtenu le prix Jules Janssen de la SAF en 2005.
 
Il est officier de la Légion d’honneur.
 
Et ce soir, il nous parle de son sujet de prédilection : le Soleil ! En effet il a lancé 5 fois une fusée Véronique depuis le Sahara pour étudier notre étoile en 1967 !
 
 
 
C’est Galilée qui commence à étudier le Soleil grâce à sa lunette, il découvre les taches solaires et met en évidence sa rotation.
 
 
Dessin de Galilée montrant l’évolution des taches solaires.
 
Il est devenu aveugle à force d’étudier le Soleil sans protection !!!
 
 
 
 
 
 
 
 
NOTRE ÉTOILE  LE SOLEIL.
 
Le Soleil représente 99,86% de la masse de notre système solaire.
 
C’est une puissante machine à fusion nucléaire.
 
Et pourtant il est toujours aussi mystérieux par certains aspects.
 
Mécanisme de la fusion solaire : d’après doc CEA :
 
Comme toute étoile, le Soleil est un gigantesque réacteur nucléaire. En son cœur, des réactions nucléaires de fusion ont lieu, au cours desquelles, l’hydrogène est transformé en hélium en libérant de l’énergie.
 
La température au centre du Soleil est de quinze millions de degrés et la densité est de cent cinquante fois celle de l’eau (150 g/cm3).
 
La transformation de l’hydrogène en hélium est complexe, elle se déroule en trois étapes :

 
 
 
·        Première étape: deux protons interagissent pour former du deutérium. Au cours de ce processus, un proton est transformé en neutron, en émettant un positron ou électron de charge positive et un neutrino, particule de la même famille que l’électron transportant de l’énergie, de masse très faible.

·        Deuxième étape: un deutérium se combine avec un proton pour former de l’hélium 3 en libérant de l’énergie sous la forme d’un rayonnement gamma (ou photon).

·        Troisième étape: deux noyaux d’hélium 3 fusionnent pour former l’hélium 4 en éjectant deux protons.
Lorsque le cœur solaire aura transformé tout son hydrogène en hélium, le Soleil se contractera sous l’effet de l’énergie de gravitation. La température en son centre augmentera jusqu’à déclencher la fusion nucléaire de l’hélium.
 
En mots plus simples :
4 protons vont fusionner pour donner naissance à de l'He4 et à de l'énergie.
C'est ce que l'on appelle la chaîne p-p de fusion.
Notre Soleil transforme 600 millions de tonnes d'H par seconde!!!
 
Mais dans l’opération, il y a déséquilibre de masse.  Le résultat (He) est plus léger que ses constituants !
5 millions de tonnes d’énergie pure sont libérées toutes les secondes ! C’est cela le secret du Soleil !
 
 
 
 
Voici un exemple de la structure du Soleil.
 
On y distingue plusieurs zones de température différente.
 
La « surface » étant de l’ordre de 5000°C, mais la couronne de quelques millions de degrés. Pourquoi ? c’est encore en partie un mystère.
 
 
 
 
 
 
 
Pour essayer de résoudre les différents mystères du Soleil, il faut s’échapper de notre atmosphère et aller dans l’espace.
 
Il y a eu une vingtaine d’observatoires spatiaux du Soleil lancée ; en voici quelques uns :
 
Un des premiers , le Japonais Yohkoh ou Solar-A
 
La sonde Ulysses de la NASA et du DLR Allemand était une sonde originale, et jusqu’à présent la seule mise sur une orbite polaire qui permettait de voir ainsi les pôles du Soleil . Elle a été lancée par une navette en 1990.
 
 
Mais celui qui révolutionné l’héliophysique, c’est SOHO  (Solar and Heliospheric Observatory), coopération internationale entre l’ESA et la NASA.
Il a été construit par Matra, lancé en 1995 et exploité par les deux agences spatiales. Il fonctionne toujours !
Il a une très intéressante orbite : il tourne perpendiculairement au plan des planètes et autour du point de Lagrange L1 du système Terre-Soleil (point où l'attraction du soleil et de la terre s’équilibrent à peu près, situé approximativement à 1,5 Million de km de la Terre). 
C’est la seule orbite qui permet de voir 24 heures sur 24 le Soleil, en effet les autres satellites d'étude du soleil étaient en orbite autour de la terre qui obstruait périodiquement le soleil. Cela permet donc d'avoir en permanence des infos sur notre astre du jour (et de la nuit car il est aussi là la nuit!), il est aussi en avance d'une heure sur le vent solaire qui va nous atteindre.
 
 
 
Il est équipé de nombreux instruments, certains qui permettant de « voir » la face cachée du Soleil.
 
Cette sonde permettait l’étude de l’héliosismologie, une vraie révolution à l’époque, c’est à dire l’étude des (faibles) oscillations du Soleil. Le Soleil vibre comme une peau de tambour, ses oscillations sont de deux types : sonores et gravitationnelles.
 
 
 
 
 
 
 
 
SOHO a donné naissance à de nombreuses nouvelles missions solaires spatiales comme Hinode et Stereo en 2006, SDO en 2010, etc..mais aussi, moins connues, TRACE en 1998 et Proba-2 de nos amis Belges en 2009.
 
 
 
 
 
Le Soleil ne tourne pas uniformément sur lui même, comme il est gazeux en grande partie, l’équateur tourne plus vite (25 jours) que les régions polaires (34 jours).
 
 
On s’en aperçoit en étudiant la rotation des taches liées à la zone convective. Par contre SOHO (instrument MDI) nous a montré que plus en profondeur, dans la zone radiative (plus rigide), cette rotation était beaucoup plus constante de l’ordre de 27 jours.
 
 
 
Les neutrinos manquants .
 
Au sein du Soleil (15 millions de degrés), il se produit de nombreuses réactions chimiques dont la résultante peut s'écrire comme suit :
 
   + énergie
 
Le soleil doit donc émettre des neutrinos, ce qui est le cas.
Ces équations étant parfaitement connues, le nombre de neutrinos émis (leur flux) est connu, mais l'énigme est que l'on détecte bien moins (on détectait 1/3 du vrai nombre) que ce qui est prédit par la théorie.
On a résolu cette énigme que récemment en 2002. Le déficit provenait en fait du type de détecteur.
 
Ce qui se passe : Il existe trois sortes de neutrinos, qui se transforment de l'un en l'autre pendant leur voyage.
 
Le Soleil émet des neutrinos électroniques qui en cours de route se transforment en les deux autres sortes.
 
C'est ce qu'on appelle l'oscillation des neutrinos solaires.
 
 
Les taches solaires.
 
 
Les taches solaires et la granulation de la surface (« grains de riz ») sont un phénomène superficiel.
 
Photo : Institute for solar physics (Suède).
 
Une tache solaire (sunspot en anglais) est liée au champ magnétique du Soleil, elle apparaît sombre car elle est moins chaude de quelques mille degrés que le reste de la photosphère. C'est un point de sortie (ou d'entrée) du champ magnétique , elle peut durer plusieurs jours. Elles vont généralement par paires.
 
Les taches solaires sont donc des endroits "froids" de la surface du Soleil où se concentre le champ magnétique.
Dans ces zones, l‘énergie magnétique est moindre, ce qui fait baisser la température.
 
 
 
 
Mais bizarrement, plus il y a de taches et plus l’activité solaire est grande (constante solaire), car même si les taches sont plus sombres que le reste de la surface, il y a autour des taches des zones plus brillantes (les facules) qui augmente globalement la luminosité.
Donc cela semble contradictoire, mais plus il y a de taches et plus la luminosité du Soleil est grande.
 
 
Une éruption solaire (solar flare en anglais) ou protubérance (prominence en anglais) est une explosion à la surface du Soleil (due à une variation brutale du champ magnétique) qui émet des particules gamma et X, protons et électrons très énergétiques.
 
Ces éruptions peuvent donner lieu à des protubérances géantes (à gauche) et à des filaments (à droite) comme on peut en voir sur ces photos prises par SDO.
 
 
 
 
 
Les éjections de masse coronale (CME : Coronal Mass Ejection en anglais) sont d'énormes bulles de gaz chaud s'échappant du soleil à grande vitesse (max 1000 km/s), le processus n'est pas connu parfaitement.
Une superbe CME par SOHO en animation gif
 
La CME la plus rapide détectée par STEREO.
 
 
LE MYSTÈRE DE LA COURONNE SOLAIRE.
 
 
La couronne solaire (ce que l’on voit lors d’une éclipse de Soleil) est des centaines de fois plus chaude que sa surface (2 millions de degrés par rapport à 5500°C !), pourquoi ? c’est le mystère du Soleil qui n’est pas encore entièrement résolu.
A-t-on violé le 2ème principe de la thermodynamique (la chaleur va toujours du chaud vers le froid) ?
 
On pense que cette élévation de température serait due à des ondes magnétiques, les ondes de Alfven, qui réchaufferait le gaz extrêmement raréfié (donc plus facile à chauffer ?) de la couronne solaire
 
 
 
 
 
 
LE MAGNÉTISME SOLAIRE.
 
 
Le magnétisme du Soleil provoque des perturbations magnétiques à un niveau global.
 
Ces perturbations magnétiques peuvent provoquer l’émergence d’une éruption, d’un filament, d’une CME qui peuvent aussi à leur tour provoquer des perturbations similaires et déstabiliser une région entière.
 
Une activité magnétique particulière du Soleil induit un cycle de 22 ans avec inversion du pôle magnétique tous les 11 ans.
Les taches solaires suivent aussi à peu près ce cycle de 11 ans, en passant d’un minimum à un maximum (Solar Max).
 
 
 
Les taches solaires apparaissent quand les lignes de champ magnétique du Soleil sont tordues par la rotation différentielle de celui-ci, souvent elles sont plus nombreuses lors de l’inversion des pôles.
 
 
 
On met au point des modèles mathématiques pour décrire l’activité magnétique du Soleil.
 
 
Photo : SDO/NASA.
 
 
 
 
LE CYCLE SOLAIRE DE 11 ANS.
 
 
Dessin :Hathaway NASA
 
En haut : diagramme papillon (butterfly) représentant la position sur le Soleil des taches solaires ainsi que leur nombre en fonction du temps.
 
En bas : le nombre (relatif en %) des taches solaires en fonction du temps pour une période récente.
 
Dans les deux diagrammes on repère facilement un cycle d’approximativement 11 ans.
 
 
 
 
 
 
 
Si on s’intéresse à une période plus ancienne, on remarque qu’il y a un « trou » à l’époque de notre Roi Soleil (quelle ironie !), c’est ce que l’on appelle le minimum de Maunder.
 
Elle correspond à une période qui a été très froide en Europe (mini âge glaciaire).
L’absence de taches n’implique pas que le cycle solaire ait disparu. (mesure de la constante solaire)
 
 
 
 
 
De la même façon si on s’intéresse à la période la plus récente, on peut voir plus en détail les deux derniers cycles solaires (cycles 23 et 24)
 
On remarque que le cycle actuel (24) a commencé en retard, le cycle précédent (23) a duré en fait plus de 11 ans, près de 13 !
 
 
Courbe : Hathaway NASA
 
 
 
 
 
 
LES PRÉVISIONS SOLAIRES.
 
 
À quelques minutes ou jours près, nos avant postes solaires comme SOHO, SDO etc… nous donnent suffisamment d’informations.
 
À plus long terme, il nous faut comprendre la dynamo solaire pour être capable d’effectuer des prévisions.
 
On attend des progrès dans ce domaine là dans les années qui viennent.
 
 
INFLUENCES DU SOLEIL SUR LA TERRE.
 
Le Soleil influence le climat terrestre par l’action de :
·        Son rayonnement.
·        Ses particules et rayons cosmiques qui pénètrent l’atmosphère.
·        Ses perturbations géomagnétiques.
 
 
Manifestement nous observons un réchauffement de notre planète :
 
·        le niveau des mers augmente globalement,
·        les glaciers se retirent des endroits où ils étaient présents pendant des siècles,
·        les glaces de l’Arctique fondent
 
Le Soleil joue-t-il un rôle ?
 
Oui, indirectement par l’augmentation de l’effet de serre dû au CO2.
 
 
 
 
 
Cet effet de serre (greenhouse effect en anglais) semble très actif dans ces dernières années, comme on le voit sur la courbe ci dessous.
 
 
Il apparaît que dans les dernières années (le dernier siècle disons) la température augmente de façon très importante.
 
 
L’échelle du graphique est en milliers d’années horizontalement.
 
L’échelle verticale de gauche : la variation de température
 
L’échelle verticale à droite : la concentration en CO2 en ppm (parties pour million).
 
 
 
 
 
CONCLUSIONS.
 
Les observations du Soleil à partir de l’espace :
·        nous confirment la validité de notre modèle solaire
·        ont contribué à résoudre l’énigme des neutrinos émis par le Soleil
·        ont révolutionné notre connaissance du magnétisme solaire
·        ont fait avancer l’étude du réchauffement
·        nous donnent une bonne idée de tous les aspects du Soleil
 
On remarque aussi que l’irradiance solaire augmente de 1% chaque 100 millions d’années !!
 
Donc notre vie sur Terre n’est pas limitée aux 5 milliards d’années du Soleil, mais à la période où l’augmentation de cette irradiance sera inférieure à 10% (en effet à ce moment là la Terre sera grillée) soit peut être 1 milliard d’années, mais on a le temps de voir venir…
 
 
 
 
POUR ALLER PLUS LOIN.
 
The sun today (vue du Soleil de ce jour).  Voir aussi ce site là.
 
Comment le soleil génère son énergie (en anglais) pour tous les âges, bien fait. Vidéo.
 
Sur le projet Iter , un astronews spécial.
 
Le projet Corot et son histoire par A Baglin
 
L’intérieur du Soleil par l’Observatoire de Paris.
 
Estimation de la masse et de l'age du Soleil à partir de données héliosismiques
 
About the Sun par le Stanford Solar Center.
 
Voyage au centre du Soleil  par l’IRFU.
 
Hinode et la physique du Soleil par S Tsunneta.
 
Vers une disparition de l'activité solaire (et un refroidissement) pour les décennies à venir ?
 
À l’intérieur d’une tache solaire animation vidéo.
 
Première lumière du Big Bear Telescope (une superbe tache solaire) vidéo.
 
Le Soleil est devenu très actif, astronews de Mars 2012.
 
Pourquoi l’atmosphère solaire est-elle plus chaude que sa surface ?
 
Voyage au centre du Soleil par le CEA.
 
Origine du champ magnétique du Soleil par Th Lombry et D Hathaway.
 
Simuler le magnétisme et la dynamique non linéaire du soleil et des étoiles
 
The sunspot cycle par le Marschal Space Flight Center.
 
Magnetic fields get reconnected in turbulent plasma too, Cluster reveals
 
Le Soleil, l’étoile mystérieuse par le CNRS.
 
The Sun as a Dynamo par le HAO.
 
Global climate change par la NASA.
 
Dossier Soleil sur votre site préféré.
 
 
 
Bon ciel à tous
 
 
Jean Pierre Martin   Président de la commission de cosmologie de la SAF
www.planetastronomy.com
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