Mise à jour 20 Novembre 2013-a (ajout vidéo)
 
 
CONFÉRENCE MENSUELLE DE LA SAF
 «DERNIÈRES NOUVELLES SUR L'HISTOIRE DE LA FORMATION D'ÉTOILES DANS LES GALAXIES: L'APPORT DU SATELLITE HERSCHEL»
Par David ELBAZ
Astrophysicien CEA , IRFU
Au FIAP, 30 rue Cabanis, 75014 Paris (métro Glacière).
Le Mercredi 13 Novembre 2013 à 20H30
 
Photos : JPM. pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.  Voir les crédits des autres photos et des animations.
Le conférencier a eu la gentillesse de nous donner sa présentation, elle est disponible sur ma liaison ftp et s'appelle :
galaxies-SAF-Elbaz.pdf, elle est dans le dossier CONF-MENSUELLES-SAF/ saison 2013-2014. .
Ceux qui n'ont pas les mots de passe doivent me contacter avant.
 
Cette conférence a été filmée en vidéo (grâce à UNICNAM et IDF TV) et est accessible sur Internet
On la trouve à cette adresse   http://www.youtube.com/playlist?list=PLM_NLeMfZ9TrYsCzaPMBOyQt7XAKRnhVW
 
 
Une salle bien pleine pour un sujet passionnant !
 
 
 
David Elbaz est astrophysicien au CEA Saclay, département de l’IRFU, l’Institut de Recherche sur les Lois Fondamentales de l’Univers, où il est responsable du laboratoire « Cosmologie et Évolution des Galaxies ».
 
 
Il nous parle ce soir de la genèse des galaxies et comment elles donnent naissance à leurs étoiles et quel rôle a joué le satellite européen en IR Herschel dans ce domaine de recherche.
 
 
 
 
 
 
 
De nombreuses questions se posent quant à la formation des galaxies , notamment :
 
1)      Quand et comment sont nées les étoiles dans les galaxies : avant ou après 10 Milliards d’années (Ga), de façon continue ou par sursaut ? l’évolution des galaxies ?
2)    Comment sont mortes les galaxies ? mort violente ou mort naturelle ?
3)    Comment sont nés les trous noirs super massifs au cœur des galaxies ? pourquoi la masse des étoiles fait-elle approx 0,1% de la masse du trou noir ? la matière éjectée par le TN est elle favorable à la formation d’étoiles ?
 
 
Efficacité de la formation des galaxies : on sait que les fluctuations primordiales ont donné des surdensités visibles sur le bruit de fond cosmologique (CMB), qui sont donc une hétérogénéité de l’espace, qui eux mêmes sont les germes des futures galaxies.
 
Au cours de l’évolution de l’Univers, il y a eu compétition entre la matière noire qui accélère la formation des structures et l’énergie noire qui les dilate.
 
Une question se pose : pourquoi l’Univers est-il si peu efficace à former des galaxies ?
 
 
Il existe un parallèle entre la composition de l’Univers et la morphologie des galaxies, que l’on voit sur la diapo ci-contre.
 
À gauche, la composition de l’Univers, on remarque que seulement 0,5% de la masse/énergie correspondent aux étoiles des galaxies.
 
Celles-ci se décomposent à droite en différents types :
74% de type sphéroïdes (étoiles mortes)
24% de type à disque et
2% d’irrégulières dont les LIRGS (Luminous IR Galaxies) à flambée de formation d’étoiles (taux de 10 à 100 fois plus que dans notre galaxie)
 
 
 
 
 
 
LES OUTILS POUR DÉCODER LE LANGAGE DE LA LUMIÈRE DES GALAXIES.
 
Ce que l’on voit de « rouge » dans le ciel peut correspondre à différentes possibilités comme :
·        vieille étoile (se meurt)
·        objet avec un fort décalage vers le rouge (s’éloigne de nous)
·        objet qui contient beaucoup de poussières (ré émet la lumière dans le rouge et l’IR)
·        étoile avec plus de « métaux »
 
Par contre les zones noires (comme le nuage de Barnard) ne sont pas, comme on pourrait le croire des zones avec peu d’étoiles, au contraire elles en contiennent énormément, mais ne sont visibles qu’en IR.
 
 
 
Les différentes périodes de l’Univers et la formation des étoiles et des galaxies. (à gauche).
 
Il est essentiel pour comprendre la formation, l‘évolution des étoiles et des galaxies au cours du temps de pouvoir « voir » dans l’Infra Rouge, c’est l’objectif de Herschel.
 
Herschel est le plus grand télescope spatial en IR avec un miroir de 3,5m. il a été lancé en 2009 et est actuellement à cours d’Hélium (2300l lui donnant une durée de vie de 4 ans) permettant son refroidissement (à 300mK !!!!).
Il a terminé sa phase opérationnelle en 2013 après avoir participé à de nombreuses découvertes.
 
 
Les atouts d’Herschel :
·        Les régions où naissent les étoiles sont très denses et opaques à la lumière visible et UV, par contre elles sont transparentes à la lumière IR
·        Les poussières interstellaires sont chauffées à 40K par les étoiles jeunes et rayonnent à 100 microns (IR) domaine de prédilection d’Herschel
·        Possède un grand miroir (3,5m) donc tache de diffraction faible.
 
Les faiblesses d’Herschel :
·        Aux grandes longueurs d’onde, faible résolution angulaire
·        Le miroir d’Herschel n’est pas refroidi, seul le capteur l’est.
 
 
 
 
 
Les différentes longueurs d’onde étudiées par Herschel permettent de plus en plus de résolution, comme on le voit sur cette représentation.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Le programme GOODS (Great Observatories Deep Survey) permet d’étudier les galaxies les plus lointaines qui émettent de la lumière IR. Car on sait qu’en plus du CMB bien connu, il existe un fond diffus IR, correspondant à toutes les étoiles nées depuis le début de l’Univers et qui ont chauffé les poussières interstellaires, celles-ci réémettant dans l’IR. Avant Herschel on ne savait pas quand et comment ce rayonnement avait été émis. Herschel a permis avec GOODS d’identifier ces sources lumineuses.
On s’est aperçu que les galaxies ont formé leurs étoiles à un rythme élevé avec un max il y a 10 milliards d’années ; pendant une durée relativement longue et contrairement à la pensée de l’époque, elles n’étaient pas liées à l’interaction de galaxies. Photo : vue de GOODS-North image prise par Herschel  bleu = 100µ ; vert = 160µ et rouge = 250µ.
 
 
 
Herschel a permis de remonter le cours du temps et de mesurer le taux de formation d’étoiles (SFR : Star Formation Rate en anglais), comme déjà dit, le taux actuel de formation d’étoiles est beaucoup plus faible que par le passé et est principalement déclenché par les collisions de galaxies, ce qui n’était pas le cas dans le passé.
En comparant la quantité de lumière IR émise à différentes longueurs d’onde par ces galaxies, on a pu montrer que le taux de formation d’étoiles dépendait seulement de la quantité de gaz à disposition dans ces galaxies. Plus il y a de gaz et plus il y aura d’étoiles.
 
 
Bruit de fond diffus IR.
 
En horizontal : le temps :
z= 0 aujourd’hui ; z =1 approx – 8 Ga ; z=2 approx – 10 Ga.
 
En vertical le taux de formation d’étoiles (SFR).
 
En noir : total IR ; en bleu sources sub LIRGS (Luminous IR Galaxies) ; en orange les LIRGS et en rouge les ultras LIRGS.
 
Le SFR était très haut il y a 10 Ga.
 
 
 
 
 
 
 
(À gauche) Puissance lumineuse rayonnée par une galaxie formant des étoiles en fonction de la longueur d’onde dans le domaine infrarouge moyen à lointain. Trois distributions spectrales en énergie sont présentées : une galaxie spirale normale (vert), une flambée de formation d’étoiles provoquée par le passage d’une galaxie voisine (bleu) et une fusion majeure avancée de galaxies (rouge). Les flèches verticales indiquent la valeur de l’indice IR8 (luminosité totale IR /luminosité à 8 microns).
(À droite) Répartition de l’influence des événements de fusions  galactiques sur les galaxies proches (graphique  bleu) et lointaines (graphique orange). La proportion de galaxies ayant un indice IR8 donné dans l’univers proche  et dans l’Univers lointain sont similaires. Les fusions galactiques n’étaient pas plus fréquentes dans le passé.
 
 
 
IR8 mesure en fait le rapport entre l'émission des gros grains de poussière et celle des molécules PAH (Hydrocarbure aromatique polycyclique). Les PAH sont fragiles, tandis que les gros grains sont résistants aux rayonnements des étoiles.
Ce rapport se trouve être un indicateur de la concentration des régions de formation d'étoiles.
Les PAH sont dépendants de la façon dont se forment les étoiles.
Si les étoiles se forment de façon plus diffuse, alors IR8 est faible car il y a relativement beaucoup d'émission des PAH.
Si à l'inverse, comme c'est le cas lors d'une fusion de galaxies, la matière interstellaire est particulièrement concentrée dans des régions compactes, alors la concentration des étoiles jeunes et massives se traduit par une valeur de IR8 plus élevée car l'émission relative des PAHs fragiles est plus faible (détruite par le flux de rayonnement UV beaucoup plus important que dans le cas précédent), comme on le voit sur la courbe rouge qui ne présente plus les spectres dus aux PAH.
 
Du coup, on peut utiliser le fait indiqué sur les deux histogrammes de droite que la proportion de galaxies à fort IR8 reste faible même dans l'univers lointain pour en déduire que la formation d'étoiles se produit de manière similaire dans l'univers proche et lointain.
 
C'est une surprise puisque les fusions de galaxies étaient plus nombreuses et cela indique donc que ces fusions jouent finalement un rôle mineur dans la formation stellaire des galaxies en comparaison de la formation d'étoiles "normale".
 
 
 
 
Comme pour les étoiles qui se placent dans un diagramme (HR) pour la plupart sur la séquence principale, il existe aussi une séquence principale pour les galaxies.
 
Cette diapo représente la séquence principale des galaxies (85% des galaxies, zone bleue). Les points rouges correspondent aux galaxies à flambées d’étoiles (starburst galaxies) qui forment beaucoup plus d’étoiles par rapport à leur masse. (un facteur 10).
En horizontal, la masse des galaxies en masses solaires.
Les galaxies à flambées d’étoiles donnent naissance à des centaines d’étoiles de type solaire tous les ans, par comparaison, notre propre Galaxie ne produit qu’une étoile solaire par an!
On rappelle que ces flambées d’étoiles sont dues à la compression de gaz lors de la fusion de galaxies.
 
 
 
 
 
Il semble que le taux de formation d’étoiles obéissent à un mode de formation universel : plus une galaxie contient du gaz, plus elle donne naissance à des étoiles.
Plus les galaxies sont massives et plus la formation d’étoiles est rapide.
Les galaxies qui n’ont plus assez de gaz (comme les actuelles, par exemple la Voie Lactée), forment les étoiles principalement grâce aux collisions de galaxies par le phénomène de starbursts. Ce phénomène n’a joué qu’un rôle mineur au cours du temps.
 
Les galaxies forment des étoiles pendant longtemps, donc elles reçoivent un apport de matière.
 
À l’intérieur des nuages moléculaires se forment des filaments dont Herschel a révélé l’existence et l’universalité: tous ces filaments ont une épaisseur de près d’un tiers d’année de lumière. À l’intérieur de ces filaments, la densité de matière est suffisamment forte pour que la gravité l’emporte sur la turbulence et que des étoiles se créent.
Des filaments de matière invisible reliraient les galaxies entre elles un peu comme des arbres liés par leurs racines.
 
 
 
Contrairement aux galaxies lointaines, notre Galaxie forme peu d’étoiles : 1 à 2 étoiles par an seulement !
 
En se basant sur des simulations numériques, les astrophysiciens pensent que c’est le phénomène de turbulence du gaz dans les galaxies proches qui serait à l’origine de ce faible taux.
Ces turbulences s’opposeraient en effet à la compression du gaz au sein de la galaxie.
 
Comme on le voit sur cette simulation dans notre Voie Lactée sur l’illustration ci-contre ou sur celle-ci plus générale.
 
 
 
 
 
 
 
Le rôle des trous noirs.
 
Chaque galaxie contient un TN massif en son centre, dont la masse semble à peu près constante : 1/1000 de la masse des étoiles du bulbe, quelque soit le type de galaxie.
Le rythme de croissance des étoiles semble donc être identique au rythme de croissance du TN central.
 
Une question se pose : les TN massifs influencent-ils la formation d’étoiles ?
 
La réponse n’est pas encore connue.
 
 
 
CONCLUSION.
 
·        Le mode de formation d’étoiles semble universel
·        La formation d’étoiles est entretenue par l’apport de matière extragalactique
·        Le rôle des fusions de galaxies pour la formation d’étoiles est secondaire
·        Les galaxies s’éteignent au cours du temps par manque d’apport de gaz
·        Les trous noirs (centraux) semblent croître au même rythme que les étoiles.
 
 
 
 
 
POUR ALLER PLUS LOIN.
 
Les clés de l’évolution des galaxies article pdf complet du CEA, à lire absolument.
 
Formation des galaxies et étoiles : CR  comm. cosmologie SAF F. Bournaud du 23 Mars 2013
 
"Les galaxies dans leur contexte cosmologique" cours de David Elbaz
 
Bouleversement dans la compréhension des étoiles par les astrophysiciens du CEA.
 
L’Univers lointain et la formation stellaire 
 
Le milieu interstellaire des galaxies
 
GOODS–Herschel: an infrared main sequence for star-forming galaxies par D Elbaz et al.
 
Les poussières du cosmos : CR de la conférence de P Boissé du 14 Mars 2009 à la SAF
 
Les étoiles massives façonnent les filaments interstellaires
 
Un nouveau regard sur la naissance des étoiles, article du Figaro.
 
Star-formation modes of galaxies through cosmic time  présentation pdf de D Elbaz.
 
Black holes and star formation: a Herschel perspective
 
La formation des galaxies : CR de la con.SAF de F Combes du 11 Janvier 2012
 
Herschel et l'astro IR : CR de la conf SAF de V Minier le 14 Oct 2009
 
 
Trou noir ou galaxie: qu'est-ce qui vient en premier ? vidéo de D Elbaz.
 
Video David Elbaz "The dominant mode of galaxy growth from deep Herschel survey” en anglais
 
 
 
 
Bon ciel à tous
 
 
Jean Pierre Martin   Président de la commission de cosmologie de la SAF
www.planetastronomy.com
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