Mise à jour le 10 Mars 2018
CONFÉRENCE
«EXPLOSIONS ET SURPRISES:
LA VIOLENCE DE NOTRE GALAXIE VUE EN RAYONS GAMMA»
Par Marianne LEMOINE-GOUMARD physicienne au CENBG
(Centre d'Études Nucléaires de Bordeaux Gradignan
Organisée par l'IAP 98
bis Bd Arago, Paris 14ème
Le Mardi 6 Mars 2018 à 19H30
Photos : JPM pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent
m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.
Voir les crédits des autres photos
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sur Canal U
BREF COMPTE RENDU
Marianne Lemoine-Goumard est physicienne au CENBG près de Bordeaux.
Elle a passé sa thèse en 2006 sur des instruments du radiotélescope HESS.
Son titre de thèse :
Stéréoscopie de gerbes de γ avec les télescopes H.E.S.S. : premières images de
vestiges de supernovæ au TeV
Elle a reçu le prix de thèse d el’X et de la SFP.
Médaille de bronze du CNRS en 2011.
Elle travailla actuellement principalement sur le télescope spatial Fermi.
Voilà le résumé de la présentation proposé par Marianne elle-même :
Le satellite Fermi et les télescopes HESS sont dédiés à l'observation du
rayonnement le plus énergétique qui bombarde la Terre : les rayons gamma. Ils
observent le ciel depuis plus de dix ans à présent et ont fourni une pléiade de
résultats tous plus inattendus les uns que les autres.
Je présenterai les surprises rencontrées dans notre propre Galaxie. Des sursauts
titanesques de la nébuleuse alimentée par le pulsar du Crabe, en passant par les
bulles de rayons gamma de plus de 50° émis au centre de notre Galaxie appelées «
Bulles de Fermi », jusqu'à l'accélération extrême de protons dans les explosions
d'étoiles massives, la richesse des résultats est inédite.
Les questions ouvertes le sont tout autant et concernent des mécanismes liés aux
pulsars, aux trous noirs et aux vestiges de supernovae. Nous les aborderons en
mettant l'accent sur la complémentarité entre les différentes expériences menées
actuellement.
Quelques chiffres importants nous sont proposés en introduction :
1 pc = 3,6 al (1 al ~ 10.000
milliards de km)
Notre Galaxie : 25 kpc de diamètre et 300 pc d’épaisseur approx. Halo de 30 kpc
Soleil à 8 kpc du centre (25.000 al)
Densité moyenne : 1 particule/cm3 !!!
Dans les nuages moléculaires : 100 à 1000 par cm3.
Le spectre électromagnétique.
Le sujet de ce soir se concentre sur la partie droite, les rayonnements les plus
énergétiques : les X et gamma.
Notamment les gammas de très haute énergie : les VHE et UHE.
Le rayonnement gamma
correspond aux
phénomènes les plus violents de l’Univers.
Comme les supernovae.
NdlR :
Les SN sont liées à la vie et à la mort des étoiles, dont on représente le cycle
de vie sur un graphique de ce genre. (diagramme
HR)
C'est un diagramme température (en horizontal) luminosité (en vertical), où
notre Soleil occupe la place centrale en référence; avec 1 pour la luminosité et
5500K pour sa température de surface.
La plupart des étoiles (90%) se placent sur le grand serpent traversant tout le
graphe, appelé la séquence principale.
Une étoile pendant toute sa vie va consommer de l'Hydrogène.
À la fin de sa vie, lorsque H est épuisé, le destin des étoiles dépend de leur
masse.
·
Une étoile de faible masse (comme le Soleil) va passer par l'étape géante
rouge, puis naine blanche
·
Une étoile massive va, elle devenir une Super Nova.
Une étoile massive, une fois H consommé, elle brûle en son centre des éléments
de plus en plus lourds comme C, O, Si jusqu'au Fe élément le plus stable de
l'Univers.
L'étoile possède alors une structure en pelure d'oignon.
Le Fer s'effondre et l'étoile meurt; elle explose ensuite en super nova.
Les SN sont les principaux sites de nucléosynthèse de l'Univers.
C'est la nucléosynthèse explosive.
Les supernovae peuvent devenir :
·
Des trous noirs
·
Des vestiges de SN
·
Des nébuleuses de pulsars et
·
Des pulsars.
Ils donneront lieu à des dispositifs d’émission variés.
Comme :
·
Interaction proton-proton
·
Bremsstrahlung (rayonnement
de freinage)
Il est intéressant de tracer les spectres des différents types d’émissions sur
tout le champ d’énergie.
Ici on a représenté :
En horizontal les énergies croissantes
En vertical leur intensité relative
LE TÉLESCOPE SPATIAL GAMMA FERMI.
L'objectif de Fermi (ancien nom :
GLAST) lancé en 2008 ; est d'étudier l'univers au moyen de rayons gamma et de
détecter ainsi les phénomènes violents.
La détection des rayons gamma est particulière, on ne peut pas utiliser un
système de télescope optique comme dans le visible car ils traversent tout (vous
vous en apercevez quand vous passez une radio) ; il faut donc une autre
technique
On détecte indirectement par action du photon gamma sur de la matière (dans
notre cas des plaques de Tungstène) , il y a alors création
d’un électron et d’un antiélectron (positron).
On détecte ces particules créées ainsi que leur direction.
Fermi explore le ciel en entier toutes les 3 heures, afin de détecter rapidement
les sources qui sont en train de changer de fréquence d'émission.
Fermi est équipé principalement de deux instruments :
Photo : le LAT et le GBM par J Grossmann /NASA
Sensibilité du LAT sur 4 échelles : 100s ; 1 orbite ; 1 jour et 1 an.
Fermi a publié en 2017 son
3ème catalogue du LAT (3FGL), il est mis à la disposition de
tous.
LES CASCADES ATMOSPHÉRIQUES.
Depuis le sol, on ne peut détecter que les sources gamma les plus énergétiques.
En effet ces gamma très énergétiques interagissent avec l’atmosphère et donnent
des particules détectables, sources de ces cascades atmosphériques.
Il y a interaction entre les photos primaires et les noyaux constituants
l’atmosphère ; création de paires et Bremsstrahlung.
Un grand nombre de particules sont créées.
Celles-ci produisent une lumière due à l’effet Tcherenkov que l’on détecte.
Ce sont ces gerbes de
particules qui atteignent les détecteurs comme par exemple
HESS en Namibie.
HESS comprend deux phases de construction :
·
Phase 1 : 4 télescopes de 12m comprenant 960 tube photo multiplicateurs (¨MT),
champ des caméras 5°
·
Phase 2 : un cinquième télescope de 28m de diamètre (600m2), 2048 PMT
champ : 3,5°. Pointé en moins de cinq minutes sur la moitié du ciel.
Il existe un pendant au HESS dans l’hémisphère Nord :
VERITAS
(Very Energetic Radiation Imaging Telescope Array System) situé dans le Sud de
l’Arizona.
Ces deux ensembles sont dans le domaine des VHE (Very High Energy) gamma.
Illustration : sources VHE publiées en 2011 du catalogue des sources TeV.
Les zones accessibles par HESS sont en rose, et celles accessibles par VERITAS
en bleu.
Les différents points de couleur identifient les différentes sources.
En magenta : les PWN (nébuleuses pulsars)
En rouge : les AGN (noyau actif de galaxies)
En vert les SNR (rémanents de SN)
En jaune : les binaires
En orange : les flambées d’étoiles
En bleu : autres sources identifiées
En gris : autres sources non identifiées.
Il existe une belle complémentarité entre l’astronomie gamma au sol et celle de
l’espace :
·
Au sol : gamme des hautes énergies TeV
·
Dans l’espace : du MeV au GeV.
ÉNERGIES MISES EN JEU.
Marianne Lemoine nous donne ensuite une idée des énergies dont on parle avec ces
quelques exemples :
·
Un micro-onde de 1kW utilisé pendant 1 minute : 60kJ
·
Énergie dégagée par le bombardement d’Hiroshima : 6 1013J
·
Énergie dégagée par la plus grosse bombe nucléaire (Tsar Bomba) : 2 1017J
·
Énergie dégagée par la météorite de Chicxulub (10km) au Mexique : 5 1023J
·
Énergie dégagée par une super nova : 1044J
·
Énergie dégagée par la Soleil en 10 milliards d’années : 1,2 1044J
LES PULSARS.
Les pulsars possèdent au centre une étoile à neutrons (provient de l’explosion
d’une étoile massive) qui tourne sur elle-même autour d'un axe.
Comme sur Terre le pôle N magnétique n'est pas situé au pôle N géographique,
c'est le cas aussi pour les étoiles à neutrons.
Le champ magnétique est décalé par rapport à l'axe de rotation.
L'émission correspond à un moment donné à un faisceau, qui balaie au cours du
temps un cône du fait de la rotation du pulsar.
Le rayonnement radio provient de cet axe magnétique quand il frappe la Terre
C'est comme le signal lumineux d'un phare en mer, et comme chaque phare, ils ont
une séquence d'allumage qui les caractérisent en propre.
Les pulsars sont extrêmement précis, beaucoup plus précis que n'importe quelle
montre, précision : 10-8.
Ils sont si précis qu'ils peuvent servir à tester la relativité d'Einstein.
Ils ont été découverts par hasard par Jocelyn Belle en 1967. Aujourd’hui on
compte approx 2000 pulsars.
Les pulsars sont les objets les plus denses de l’Univers après les trous noirs.
Ils sont de l’ordre de la masse de notre Soleil pour un diamètre de 10km !
Le champ magnétique produit est de l’ordre de 1012 Gauss ; chiffre
énorme, rappelons que le champ terrestre est de 0,5 Gauss.
On note des périodes allant de 2ms à 10s. on s’intéresse même aux
pulsars millisecondes qui
tournent extrêmement rapidement. Fermi en a découvert beaucoup.
Illustration : plus de 200 pulsars gamma dans notre Galaxie.
On s’est aperçu aussi que les pulsars émettent des gammas jusqu’à 1TeV.
La nébuleuse du Crabe bien connue (M1 ou SN 1054) est le reste d’une supernova
ayant explosée en 1054.
Elle possède en son cœur un pulsar puissant (PSR B0531+21).
Il semblerait que l’on ait détecté des variations et que le pulsar du Crabe ne
soit pas
aussi stable qu’on le pense..
Une dernière surprise : les bulles de Fermi.
Il semblerait qu’elles soient liées au TN central.
Comme le souligne Marianne Lemoine : un PeVatron au centre de notre Galaxie.
Le télescope spatial gamma, Fermi, vient de mettre
en évidence deux mystérieuses et énormes bulles de part et d’autre du centre
de notre galaxie.
Chacune est grande de 25.000 années-lumière (on rappelle que la Voie Lactée a un
diamètre approximatif de 100.000al).
Il semblerait que ces structures seraient « récentes », au sens astronomique du
terme, soit quelques millions d’années.
LE CHERENKOV TELESCOPE ARRAY (CTA).
Afin d’améliorer la détection gamma, un nouveau projet a été développé : le
projet CTA : CherenKov Telescope Array.
C’est un consortium international
de 1400 membres et de 208 instituts de 32 pays.
Deux sites ont été sélectionnés :
·
Hémisphère N : La Palma, aux Canaries
·
Hémisphère s : Paranal au Chili
3 tailles de télescopes disponibles et 120 télescopes en tout.
Illustration : Petit cercle jaune : ce que l’on peut détecter actuellement de
notre Galaxie.
Grand cercle jaune : ce que l’on espère avec le CTA.
On espère aussi améliorer la sensibilité.
Première lumière fin 2018 aux Canaries.
EN CONCLUSION.
·
Incroyable diversité du ciel gamma : nombreuses sources et différents
mécanismes.
·
Des résultats inattendus au centre de notre Galaxie, révèlent de nouveaux
accélérateurs.
·
De nouveaux instruments vont arriver avec de nouveaux résultats et de nouvelles
questions.
POUR ALLER PLUS LOIN :
Astronomie Gamma : CR conf IAP de H Sol du 5 Déc. 2017.
Astronomie Gamma
par la Radioactivté.com
Proof: Cosmic Rays Come from Exploding Stars
Fermi, turbulences dans l’Univers : CR conf SAF d’Isabelle Grenier du 14 nov
2012
NASA's Fermi Telescope Poised to Pin Down Gravitational Wave Sources de la
NASA
J Bell Burnell :
Sur les pulsars UNESCO 16 Janv. 2009
FERMI/GLAST :.deux bulles de part et d’autre de la voie lactée
Le CTA (Cherenkov Telescope Array) à l’IRFU (CEA)
HESS : découverte d'un accélérateur cosmique au centre de la Voie Lactée par
Futura Sciences
L'expérience H.E.S.S. découvre un accélérateur cosmique en pleine action au
centre de la Voie Lactée par le MPI
Astronomie gamma avec HESS présentation pdf d’Olivier Martineau. Très bien à
voir absolument
Bon ciel à tous !
Jean Pierre Martin .Commission de Cosmologie de la SAF.
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