mise à jour le 17
Décembre 2004
CONFÉRENCE
SUR "LE MONDE DE SATURNE"
Sous
titrée "L'héritage de Huygens"
Par Cécile
FERRARI,
Maître de conférence à l'Université Paris VII
Service
d'Astrophysique du CEA Saclay
Organisée par la
SAF
À l'Institut
Océanographique rue St Jacques, Paris
Le Mercredi 15 Décembre 2004 à 20H30
Photos : JPM pour
l'ambiance.
BREF COMPTE RENDU
C'est une
conférence qui tombe à pic, en effet dans quelques jours la sonde Huygens
emportée dans les bagages de Cassini devrait se poser sur Titan, donc une
révision de nos connaissances ne pouvait pas faire de mal.
Cécile Ferrari est
une grande spécialiste du monde de Saturne, nos lecteurs ont déjà lu ses
exploits lors des Rencontres Astronomiques des Yvelines (RAY) de l'été dernier.
Elle a été
présentée par Roger Ferlet de l'IAP spécialiste des exoplanètes, que l'on voit
sur la photo ci dessous.
On part des
travaux de Huygens pour mettre cette mission en perspective.
En fait avant
Huygens on ne comprenait pas bien ces bizarres formes autour de la planète
Saturne.
C'est Chritiaan
Huygens (oui il y a bien deux a dans le prénom) le physicien et astronome
Hollandais qui le premier comprend en 1655 que ce sont des anneaux qui sont vus
de la Terre différemment suivant la position de Saturne sur son orbite, comme
reproduit sur le dessin ci dessous par Huygens lui même.
Il découvre la
même année le plus gros satellite, Titan (il ne portera ce nom que bien plus
tard).
Huygens mesure
aussi la période de Titan avec précision (c'est aussi un horloger, qui va faire
faire des progrès immenses dans cette technique). Une des raisons de ces
"premières" astronomiques dues à Huygens tient au fait que c'est lui
qui a les meilleurs instruments optiques de l'époque!!!
Plus tard Jean
Dominique Cassini, fondateur d'une dynastie d'astronomes, qui vient
d'abandonner son compté de Nice natal (Italien à l'époque) pour prendre le
poste de responsable de l'Observatoire de Paris, reprend cette même idée et
profite du prochain passage par la tranche en 1671 (tous les 14 ans et demi)
pour étudier l'environnement des anneaux.
En effet , le passage par la tranche des anneaux permet en
s'affranchissant de la très forte lumière réfléchie des anneaux d'observer
l'environnement de la planète et ainsi de découvrir de nouveaux satellites,
c'est la raison pour laquelle c'est une période très appréciée des astronomes.
Les plus gros
satellites ont été découverts par Cassini lors de ces passages comme nous le
fait remarquer Cécile Ferrari :
En 1671 : Japet et
Rhéa; en 1684, Dioné et Téthys.
Puis un grand trou
et c'est seulement en 1789 que Herschel qui lui aussi à cette époque a les
meilleurs instruments, découvre Mimas et Encelade, plus petits que les
précédents. Hyperion vient en 1848 et Phoebe en 1898 et un grand vide jusqu'à
la fin du XXème siècle où Audouin Dollfus découvre Janus en 1966, tous ces
satellites sont de plus en plus petits bien sûr (en moyenne 50km).
En 3 siècles nous
avons gagné 2 ordres de grandeur sur la taille des satellites (5000km à 50km).
Les
misions spatiales vont nous en faire gagner encore en découvrant des minuscules
satellites et de plus en plus près des anneaux.
Les missions
Voyager introduisent la notion de satellites bergers
ou gardiens, qui confinent certaines portions d'anneaux comme Pandore (à
l'extérieur) et Prométhée (à l'intérieur) avec l'anneau F que l'on voit sur la
photo.
Voir explication de ce phénomène à la fin du texte.
L'anneau F (photo)
et ses satellites gardiens a été étudié à fond par notre conférencière à
l'occasion du passage de 1995 qui présentait l'intérêt d'être triple en
l'espace d'un an (Mai et Août 1995 et Février 1996).
Tous les
instruments terrestres (VLT de l'ESO et CFHT) et extra terrestre (Hubble) sont
mobilisés à cette occasion.
Cécile Ferrari
nous présente une animation de la détection des petits satellites de l'anneau F
très impressionnante dont je ne peux que reproduire la photos ici.
(document ci
dessus de S Charnoz)
Voyager découvre
une douzaine de satellites irréguliers de très petites tailles et à orbites
inclinées (astéroïdes de la ceinture de Kuiper capturés par Saturne?).
Puis vient enfin
la mission Cassini, départ en 1997 à l'aide de la deuxième Titan Centaur, une
paire de swings gravitationnels pour profiter de l'effet de fronde des planètes
et hop, en route pour Saturne que l'on atteint été 2004.
L'épopée est
connue est a été relaté maintes fois ici (voir Archives
Astronews Saturne).
Néanmoins quelques
détails importants.
La
mission est prévue jusqu'en 2010,
et contrairement aux Voyager, on est on orbite autour de Saturne, on ne fait
pas que passer, on a tout le temps.
La mission
commence d'abord par un sacré numéro, la sonde passe entre les anneaux F et G
pour se mettre en orbite. Tout va bien.
Les
orbites d'ailleurs sont prévues afin d'étudier tout l'environnement, elles sont en "pétales".
Elles vont
permettre plus de 70 orbites dont 45 passages au dessus de Titan, et plusieurs visites
de tous les satellites principaux.
Sur le diagramme
suivant on remarque :
En rouge l'orbite
d'arrivée
En jaune les
orbites à occultation
En vert les
orbites équatoriales
En bleu les
orbites de transfert
En violet les
orbites équatoriales de nouveau
En gris les
orbites à fortes inclinaisons.
Une
des grandes découvertes (d'abord par Voyager puis confirmées par Cassini) sont les surdensités (ou arcs) dans certains anneaux ainsi
que 6 nouveaux satellites (pour le moment).
Ces surdensités
sont un problème, car d'après les lois de Kepler, ils ne "peuvent"
pas exister.
On espère que
Cassini avec sa grande résolution va permettre d'émettre quelques hypothèses
sur ces étranges agrégats de matière. 'satellite en phase de formation??)
De belles photos très précises nous
arrivent tous les jours comme vous le savez en suivant la rubrique des
actualités sur ce site.
Certaines sont
étonnantes comme les ondelets de la division de Encke.
En regardant les
photos des différentes températures des anneaux, elle nous fait remarquer que
plus ils sont denses plus ils sont froids.
Puis vient la
cible privilégiée : Titan, une atmosphère
épaisse d'azote, une température très froide (-168°C), bref une Terre au
congélateur. C'est pour cela que l'étude de Titan est intéressante, ce serait
équivalent à une Terre en phase de formation. Étudier Titan ce serait étudier
notre passé.
Le 13 Décembre
survol de la zone d'atterrissage par Cassini avec de nouvelles images (pas très
claires).
Cécile
Ferrari nous donne rendez vous pour l'atitanissage (oui je sais ce mot n'existe
pas!) le 14 janvier 2005 que nous devrions pouvoir suivre en léger différé
(mais en direct de la sonde Cassini, car les images sont d'abord stockées dans
Cassini) à la Cité des Sciences de Paris.
Bref une bien
belle et intéressante soirée sur le monde de Saturne qui nous met l'eau à la
bouche dans l'attente des prochaines découvertes de ce nouveau monde.
Merci Cécile
Ferrari de nous avoir fait rêver.
POUR COMPLÉTER TOUTES CES INFORMATIONS
NE PAS MANQUER LA SOIRÉE SPÉCIALE ORGANISÉE PAR LA SAF LE CNES ET L'ESA
SUR L'ATTERRISSAGE DE HUYGENS SUR TITAN
LE 14 JANVIER 2005 À L'AUDITORIUM DE LA CITÉ DES SCIENCES DE PARIS
DE 20h30 À …….
ENTRÉE LIBRE DANS LA LIMITE DES PLACES
CE SERA MÉMORABLE
Bon ciel à tous
Jean Pierre
Martin www.planetastronomy.com
Membre de la SAF
LES SATELLITES BERGERS , COMMENT ÇA MARCHE?
Il peut paraître
étonnant que deux petits bouts de pierre, on les appelle des satellites bergers ou gardiens (shepherd satellites en
anglais) confinent un anneau de particules comme on le voit sur Saturne (mais
c'est un phénomène général), mais on va voir que c'est normal et lié bien
entendu aux interactions gravitationnelles.
Ce n'est pas la
seule possibilité pour avoir des zones avec plus ou moins de densité de
particules, il y a aussi un phénomène lié, les résonances avec les gros
satellites. (voir explication de ce phénomène). Cette technique basée sur les
effets gravitationnels (les forces de marée) comprend aussi l'introduction de
la limite de Roche.
Tout ceci fera partie
d'un texte plus général prévu pour bientôt.
Quelques rappels :
D'après les lois de Kepler, tout corps qui tourne près d'un
corps central tourne plus vite qu'un corps plus éloigné (loi des aires).
Quand deux corps
s'approchent, ils s'attirent suivant la loi de Newton, le plus gros attire plus
fort le plus faible.
Le cas a)
correspond à un satellite circulant entre deux anneaux, on va voir que là aussi
il "garde" l'intégrité de l'anneau et l'empêche de s'étaler.
En effet supposons
qu'une particule de l'anneau de la partie supérieure veuille se rapprocher du
satellite, mais alors celui-ci quand il va passer devant (il tourne plus vite
car plus près de la planète) va l'attirer (gravitation universelle) un peu plus
et ceci à chaque fois qu'il va la dépasser (effet cumulatif). Cela va ralentir
la particule qui va avoir tendance à réduire sa vitesse donc à retourner sur
une orbite plus haute; elle retourne à sa place d'origine.
Même raisonnement
pour une particule de l'anneau inférieur.
Ce
satellite "nettoie" l'espace entre les
deux anneaux (gap en anglais) c'est comme cela que c'est crée la division de Encke; c'est le mini satellite Pan (20km
de diamètre) qui "garde" cette division de 300km de large.
Cas b), c'est le cas où deux petits
satellites sont situés de part et d'autre d'un anneau (fin en général), comme
pour l'anneau F de Saturne.
Avec un
raisonnement similaire à celui ci-dessus, on voit que si une particule de
l'anneau essaie de s'approcher du gardien intérieur (diminuer la distance,
augmenter la vitesse) alors, il va passer de plus en plus fréquemment près de
ce satellite gardien qui l'attire un peu plus à chaque passage. Cela va le
ralentir, et donc le ramener vers son orbite d'origine dans l'anneau. Même
raisonnement si la particule s'aventure de l'autre côté. L'anneau est ainsi
gardé par ces deux satellites.